Crédit: Roger Mawulolo LAS

Le prix Nobel de littérature et l'Afrique : encore de grands pas à faire

Le prix Nobel de littérature 2021 est africain. Il s’agit du tanzanien Abdulrazak Gurnah pour son roman “Paradise”. Une occasion de revenir sur les auteurs du continent noir déjà récipiendaires de ce prix prestigieux.

Les Africains, prix Nobel de littérature – Infographie : Roger Mawulolo

Avec le sacre de Gurnah, l’Afrique totalise cinq prix Nobel de littérature. Et dire que ce prix existe depuis 1901.

L’Afrique australe a deux lauréats tous venus de l’Afrique du sud tandis que l’Afrique de l’Ouest en a un, provenant du Nigeria. L’Afrique du Nord, avec l’Egypte dispose également d’un récipiendaire du Nobel de littérature. Avec Abdulrazak Gurnah, l’Afrique de l’Est, avec la Tanzanie, vient d’avoir son premier récompensé. Sur les 5 africains primés, il y a une seule femme.

Allons à leur découverte dans l’ordre chronologique des obtentions.

Le Nigérian Wole Soyinka, à jamais le premier Nobel africain (1986)

Le natif d’Abéokuta vit le jour le 13 juillet 1934. Romancier, dramaturge, essayiste mais aussi poète et metteur en scène, Wole Soyinka est également un homme politique dans son pays, le Nigeria. Il est le premier africain à se voir décerner le prix Nobel de littérature.

Auteur très prolifique, il a plus de 60 œuvres produits ou rédigées, toutes tendances confondues. De lui, nous avons le célèbre concept de tigritude.

« Un tigre ne proclame pas sa tigritude. Il bondit sur sa proie et la dévore. »

Wole SOYINKA

Wole Soyinka a obtenu le prix Nobel de littérature avec “Baabou roi”. Le jury du prix en a dit ceci : « qui, dans une perspective culturelle large et avec des connotations poétiques, propose le drame de l’existence ».

L’Égyptien Naguib Mahfouz (1988)

Le deuxième auteur Africain à remporter le prix Nobel de littérature a été l’Égyptien Naguib Mahfouz en 1988. Né le 11 décembre 1911, il est auteur de langue arabe. Il cumule près d’une soixante d’œuvres littéraires entre romans et fictions.

L’une de ses œuvres les plus connues “Les fils de la Médina” a été publié en 1959. C’est cette œuvre qui lui ouvrit les portes du prix Nobel, dont le comité de sélection dira : « qui, à travers des œuvres riches en nuances – clairement réalistes, ambiguës et évocatrices – a formé un art narratif arabe qui s’applique à toute l’humanité ».

En 1994, il perdit l’usage de sa main droite suite à une tentative d’assassinat par des fanatiques musulmans sur sa personne. Il dictera désormais ses textes jusqu’à son décès le 30 août 2006.

La Sud-Africaine Nadine Gordimer (1991)

Nadine Gordimer poussa ses premiers cris à Springs, en Afrique du Sud, le 20 novembre 1923. Son œuvre a servi à dénoncer l’apartheid qui a sévi dans son pays. Elle a écrit sa première nouvelle à l’âge de 9 ans suite à la fouille, par la police, de la chambre de leur domestique noire. Un engagement précoce direz-vous.

Elle est l’auteure de 15 romans, 200 nouvelles et plusieurs recueils d’essais et de textes critiques. Outre le prix Nobel de littérature, elle a également reçu en 1974 le Man Booker Prize.

Nadine Gordimer est décédée le 13 juillet 2014 à Johannesburg. Son prix Nobel de littérature a été obtenu grâce à son roman “Un amant de fortune” dont le Comité du prix Nobel dit « l’œuvre épique a rendu à l’humanité d’éminents services »

Le Sud-Africain John Maxwell Coetzee (2003)

Fils d’un avocat et d’une institutrice, John Maxwell Coetzee est né au Cap le 9 février 1940.

D’abord formé en linguistique et en informatique, sa vie professionnelle débuta par un poste de programmeur chez IBM. Nourrissant toujours des ambitions littéraires, il a su profiter d’une bourse pour reprendre des études d’anglais et obtint un doctorat en 1965 à l’Université du Texas à Austin.

Il publia son premier roman, « Terres de crépuscule« , en 1974.

Avant son prix Nobel de littérature en 2003, il a obtenu par deux fois le Man Booker Prize en 1983 et en 1999.

L’Afrique peut pousser un ouf de soulagement car J. M. Coetzee est devenu australien depuis 2006 donc après son prix de Nobel de littérature. Ce prix obtenu grâce à son œuvre “Disgrace” qui a suscité le commentaire suivant de la part du jury : « qui dans de multiples travestissements expose la complicité déconcertante de l’aliénation ».

Abdulrazak Gurnah, l’actuel benjamin (2021)

Le comité de sélection du prix Nobel de littérature dit avoir choisi l’œuvre “Paradise” de Gurnah « pour ses récits empathiques et sans compromis des effets du colonialisme et le destin des réfugiés pris entre les cultures et les continents ».

Abdulrazak Gurnah est né en 1948 sur l’île de Zanzibar qu’il a dû quitter vers 1960 pour se réfugier en Angleterre. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et le désormais professeur d’université, a produit des œuvres de qualité. Avant le prix Nobel de littérature 2021, il a été lauréat du prix RFI Témoin du monde en 2007, avec “Près de la mer”.

Trois œuvres de Gurnah ont été traduites en français. Il s’agit de : Paradis, Près de la mer et Adieu Zanzibar.

Chose notable, le benjamin Gurnah a beaucoup étudié l’aîné de la fratrie des Nobel de littérature africaine, Wole Soyinka. De là, à voir une relation de cause à effet ?

En définitive, l’Afrique totalise cinq lauréats sur 118, soit un pourcentage assez faible de 4,24 %. Et dans ce maigre butin de guerre littéraire, aucun auteur africain d’expression française n’est encore apparu. Vivement que cela vienne.

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