Prologue : Ne vous offusquez pas, chères sœurs et amies, pour ce billet car en ce lendemain d’une journée qui vous était dédiée, ma jalousie me pousse à tenir un langage de macho. Je vous envie, c’est tout… Une journée de plus pour vous seules alors que nous, les hommes, n’avons que la fête des Pères. Pourquoi ?
Je déverse donc ma bile.
Chez moi, là d’où je viens et là où je vis (ce sont deux lieux différents), on dit souvent que pour être considérée comme une bonne épouse, un des ingrédients sine qua non est de « savoir s’occuper du ventre de son homme » (entendez par là lui faire de bons mets). Savoir cuisiner pour une femme serait donc un des gages de succès de sa vie de couple. Nos mamans le soutiennent tandis que nos sœurs semblent ne plus considérer ce facteur.
On ne naît pas cuisinière, on le devient …
De notre temps (expression vague destinée à vous embrouiller sur mon âge réel 😀), les filles s’occupaient de la cuisine avec maman et les garçons de l’entretien du salon et du véhicule (moto ou voiture, voire même vélo) de papa.
Ce qui faisait d’elles des cuisinières de bon niveau. Qu’elles soient douées ou pas pour cela, qu’elles aient une mauvaise volonté ou pas, elles arrivaient quand même à avoir les bases nécessaires pour tenir une cuisine une fois mariée. Une fille qui ne sait pas cuisiner, la fautive est automatiquement sa maman. C’est du « telle mère, telle fille »

D’où je viens, on dit souvent que la crainte des mères était qu’on leur renvoie leurs filles, de leur foyer, avec une bouteille remplie de la sauce fade qu’elles auraient préparée ainsi qu’une enveloppe kraft contenant l’accompagnement (riz, pâte, frites…) non réussi. Vous voyez un peu ?
Le phénomène n’est pas seulement africain. Dans certains pays même, on peut les voir cuisiner pour appâter l’élu de leur cœur. Une amie suissesse m’a confirmé qu’elle avait cuisiné du lapin à son « bon ami » lorsqu’ils n’étaient pas encore mariés pour lui prouver qu’elle n’était pas nulle devant un fourneau. Après ils sont devenus mari et femme. Le catalyseur a-t-il été le plat de lapin ? Je ne sais pas. Mais ma mauvaise foi déclarée du jour envers les femmes me fait dire que c’est bien cela.
Quand on fait une publicité du couple idéal dans les campagnes pour des produits alimentaires et qu’on y montre une jolie dame cuisinant avec un grand sourire, là toutes les femmes sont d’accord que le bonheur du foyer ne peut venir que d’elles. Mais dès que dans la réalité, on veut dire que la cuisine doit être le lieu d’expression de la femme uniquement, là tout se gâte.
Pourquoi voulez-vous que j’aille à la cuisine avec vous? Elles vont me dire que ce serait une preuve d’amour.
De nos jours, c’est compliqué…

La majorité des filles ou jeunes femmes de nos jours ont des difficultés étonnantes à être à l’aise à la cuisine.
« Hé, Kossi (prénom masculin), pour l’omelette je mets l’eau ou l’huile ? » est l’une des questions qu’on peut s’entendre poser. Une pensée populaire conclut que les filles d’aujourd’hui, craignent le fourneau au point où on se demande si elles n’ont pas un produit inflammable dans leur pagne ou leur pantalon, car elles semblent craindre de les voir se brûler à l’approche du feu.
Certaines se rabattent sur les recettes rédigées alors que nos mamans y allaient juste par empirisme et expérience. C’est bien de s’en référer aux recettes écrites, mais il faut quand même quelques bases de cuisine pour pouvoir bien les appliquer. Les cuisinières 2.0, abonnées aux sites web de recettes de cuisine, réussissent à faire de bons plats si et seulement elles ont la base nécessaire. Dans le cas contraire, c’est le flop total. On en connaît qui n’ont jamais fini la cuisine prétextant la mauvaise qualité de la connexion de nos pays africains. J’exagère. N’est-ce pas ? Je vous avais dit que je déversais ma bile…
Avec mes talents de chimistes (vous en doutez ?), je peux vous dire qu’une recette peut avoir des résultats variant selon les lieux. Eh oui, la composition de l’eau des robinets de Lomé, de Dakar, de Yaoundé est-elle la même que celle de Paris ?
« Cuire à feux doux de fourneau » est-elle équivalente à « cuire à feu doux de cuisinière à gaz ?
Plusieurs questions comme ça me viennent à l’esprit; mais je vous en épargne. Dans tous les cas, il faut avoir la base nécessaire couplée à de l’expérience pour réussir même les recettes toutes faites.
Tandis que certaines abonnent leur mari au fast-food (hamburger, chawarma, hot dog), d’autres se contentent de bourrer leur préparation de bouillons (cubes, glutamates) sensés donner du bon goût aux mets. Hummmm et dire qu’il paraît que tout ça diminue notre « capacité de garçon » autrement dit notre virilité. Du moins, c’est que la rumeur populaire dit.
A sérieusement considérer…
Celles qui ont confié leur cuisine à leur femme de ménage ont été souvent surprises. Si le mari qui conjugue son entrejambe à son ventre ne détourne pas son regard vers là-bas, c’est la femme de ménage qui se chargera un de ces jours de rappeler à madame qu’elles n’ont pas le même niveau.
En tout état de cause, vous ne pouvez prétendre être l’épouse :
- d’un vrai Togolais si vous ne savez pas préparer du « akoumê » (pâte de maïs)
- d’un vrai Sénégalais si vous n’avez pas de manière innée la recette du « tchep bou djène » (riz au poisson)
- d’un vrai Camerounais si vous n’avez pas sur le bout des doigts la préparation des bâtons de manioc et du « ndolê » (sauce à base d’une plante légumière)
- d’un Congolais si vous ne savez pas préparer du « saka-saka » (sauce à base de feuilles de manioc)
- d’un Ivoirien si vous ne connaissez pas la recette du « zégen » ou « garba » (atièkè – couscous de manioc- et thon)

Au-delà de ces exemples, il est important de préciser que les spécificités des plats même dépendent encore des régions de chaque pays.
Le phénomène n’est pas exclusivement africain, il est universel, c’est pourquoi dans « Casseroles, amour et crises. Ce que cuisiner veut dire », le sociologue Jean-Claude Kaufmman a estimé que le fait de cuisiner construit le couple et renforce la vie conjugale.
La femme n’a-t-elle pas dans notre imaginaire une figure de mère nourricière ? Notre première nourriture sur terre n’a t-elle pas souvent été le lait maternel ?
A bon entendeur (au féminin), demi-mot…
Comme dirait un chanteur de chez moi, nommé Dee Kwarel : « La logique masculine a vraiment l’air idiot, car la magie féminine à toujours le dernier mot ».
Bonne fête de la femme quand même.
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